Sur le fil du rasoir

Devant un Beaublanc des grands soirs, Limoges a tremblé jusqu'à la dernière seconde pour faire tomber le leader. Rouen n'est pas à cette place par hasard, et Limoges a du pousser sa défense à son meilleur niveau pour garder un tout petit point d'avance dans un match marqué par un arbitrage... peu commun ! Score final : 69-68.

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L'affiche était belle, et les supporters ne s'y sont pas trompés en remplissant Beaublanc jusqu'aux cintres. Wilfried Duchemin, qui s'improvisait ce soir chauffeur de salle, a ainsi pu indiquer aux 4980 supporters présents (il a lui même annoncé le chiffre), qu'il espérait bien voir Beaublanc redevenir « la salle la plus chaude de France ce soir ». M'est avis qu'il n'a pas été déçu...

Les cinqs de départs sont constitués de Robinson, Tucker, Salmon et Almonte, sous la baguette de Lukovski, face à Dorsey, Williams, Thioune, Moncade et Toffin. Le premier ballon est Limougeaud et voit rapidement Lukovski tenter son premier shoot, mais c'est bien Rouen qui ouvre la marque. L'attaque Limougeaude est aux fraises, et les Limougeauds marquent pendant les 5 premières minutes autant de panier qu'ils prennent de temps-morts, c'est à dire un. Les normands sont en revanche bien mieux rentrés dans leur match (2-8, 5°). Lukovski avait ce soir une tête de martyr, et la défense Rouennaise ne lui a fait aucun cadeau. Ceci lui permet d'amorcer une remontée sur la ligne de réparation. Almonte prend ensuite le relai, d'une interception conclue en contre attaque par Robinson, puis en pénétration. Robinson perd un ballon et son contre sur la contre-attaque de Thioune est jugé invalide. Il se rattrape heureusement sur la possession suivante. Oyono ramène enfin les deux équipes dos à dos à la 8° minute (12-12). Il ne s'arrête pas là, poussant ensuite Williams à la faute avant de conclure sur une passe de Larrouquis. Il s'avère également précieux en défense, Toffin ayant toutes les peines du monde à trouver une ouverture. L'autre récente recrue, Mekdad, brille en revanche surtout pour ses problèmes d'équilibre... trois petites chutes et puis s'en va. Un dernier shoot de Larrouquis ne donne rien, et les deux équipes se trouvent neutralisées après 10 minutes : 16-16. Heureusement que Limoges a sa nouvelle défense, car l'attaque est plutôt... inquiétante !

Dès les premiers instants du deuxième quart-temps, l'homme du match commence à s'illustrer. Fait peu commun, cet homme est... une femme. Ne cherchez pas, je parle de l'artiste du sifflet qui officiait ce soir. Nous n'avons pas pour habitude sur Beaublanc.com de nous étendre sur les erreurs d'arbitrage - après tout, elles font aussi partie du sport. Mais ce soir, grâce à cette femme, l'erreur d'arbitrage est devenu un sport. Son premier fait d'arme a été de considérer que Lukovski avait posé un pied en touche, juste sous le nez de Cousin. Dans les instants qui ont suivi, on ne peut pas dire que le nouveau coach Limougeaud se soit fait une amie ! Après quelques temps de Confusion, Gouez et Tucker jouent les 2 points + faute, avec succès. Limoges a clairement élevé son niveau en attaque, et les rares paniers Rouennais sont assez litigieux (marchés ou fautes non-sifflés). L'adresse en berne du premier quart n'est plus qu'un souvenir, et même le shoot casse-croute de Tucker au buzzer rentre. Ajoutez à cela un autre 3 points de Toti, et Limoges assène un violent 10-2 aux visiteurs (31-23, 16° min). Une interception de Renaux offrant une contre-attaque à Salmon réveille enfin Beaublanc. Jusqu'alors, ce n'était pas vraiment mou, mais on sait bien que Beaublanc a beaucoup plus que ça dans le ventre. Rouen revient lentement dans le match en profitant des fautes Limougeaudes. Notre chère agacée du sifflet inflige une technique à Robinson, qui ne se laisse pas démoraliser pour autant et enchaine à 3 points. Limoges rallie ainsi la pause avec plus de 10 points d'avance : 42-31. Après un round d'observation, Limoges a vraiment commencé à jouer, en étouffant bien l'attaque Rouennaise.

On peut alors penser que cette avance permettra à Limoges de voir venir sereinement pendant la deuxième mi-temps. Hélas, dès la première possession, Toffin score de loin tandis qu'une faute de Lukovski offre la possession suivante aux visiteurs qui se font un plaisir de récidiver. Un combat d'artilleurs s'entame alors, Thioune répondant du tac au tac à Salmon. Le schéma défensif limougeaud est de fait inefficace face aux assauts Rouennais, et Cousin ne tarde pas à réagir (45-40, 22°). Un temps-mort, et l'entrée de Toti et Oyono visent à redynamiser un peu le collectif Limougeaud. Robinson artille à longue distance, et Limoges retrouve du collectif. Une action voit ainsi Oyono voler un bon ballon, que Larrouquis confie à l'aveugle à Tucker. L'américain ne fait pas mouche, mais à l'occasion de retenter de plus près, avant qu'Almonte ne conclue enfin. Il y a du monde pour aller chercher les deuxièmes chances, et ça paye ! La femme du jour se rappelle ensuite aux bons souvenirs de Beaublanc. Elle inflige une technique à Gouez qui jouait normalement son rebond défensif. Larrouquis et Toti ont le tort d'essayer de lui expliquer son erreur, et Beaublanc aussi... à sa manière. Dorsey et Moncade tirent leurs lancers sous une bronca des grands soirs, mais cela ne les empêche pas de relancer complètement la partie (52-49, 27° min). Une certaine confusion s'ensuit sur le terrain, et le temps-mort demandé par le coach Rouennais permet aux deux équipes de retrouver un peu leurs esprits. Les visiteurs se montrent hélas une nouvelle fois plus lucides, et profite d'une malchance chronique de Salmon pour prendre la tête. Dorsey n'a besoin que d'un trou de souris pour s'infiltrer et aller scorer, tandis que la défense des Normands continue son acharnement sur Lukovski. Et lorsque ce dernier se fait sécher par les défenseurs, devinez... on siffle un marché bien sûr ! Rouen réalise une excellente opération dans ce qui est sans doute le quart-temps le plus mal arbitré depuis longtemps à Beaublanc, et inflige un 24-10 à Limoges (52-55, QT3). On a alors l'impression que les dix dernières minutes se joueront à 6 contre 6, Rouen ayant 1 sifflet en renfort et Limoges 4980 siffleurs.

Tucker offre une éclaircie en début de 4° quart d'un tir primé, bien complété par le contre énorme d'Oyono sur Thioune. Les autres cerclistes restent toutefois sur leur faim, et peinent à prendre l'avantage. Lukovski subit les assauts de Toffin puis s'initie au vol libre sous l'impulsion de Moncade. Il ne se décourage pas pour autant et distille un caviar à Almonte, mais cela ne suffit pas encore. L'objectif du temps-mort du coach Limougeaud est bel et bien de trouver une solution au gros problème d'adresse qui bloque le csp. Et rapidement, de préférence (57-62, 35° min). Cousin aligne alors un 5 final intéressant, composé de ses 4 étrangers et de... François Renaux. Le chien de garde défensif montre une nouvelle fois sa progression depuis son statut de cireur de banc de la saison dernière, et sa place n'est pas usurpée. Almonte ramène doucement Limoges dans le match en attaque, à la conclusion ou la passe pour Tucker. Lukovski commence alors à sortir le grand jeu. Jusqu'ici essentiellement cantonné à un rôle de punching-ball, il temporise malgré l'urgence, pour mieux servir Tucker. Et quand enfin il trouve la mire à trois points, ça fait un bien fou (66-64, 38°min) ! Thioune, déjà très présent tout au long de la rencontre, se montre alors incontournable. Il marque deux fois, offrant entre temps deux lancers au maestro serbe. Ce dernier redonne enfin l'avantage à Limoges à 42 secondes du terme (69-68). Mais 42 secondes, c'est long ! Renaux impose une presse étouffante à Moncade, incapable d'avancer. Limoges profite alors de son excellente gestion des fautes dans ce quart-temps ; Renaux ne commet que la troisième faute d'équipe, et peut ainsi réinitialiser le compteur sans envoyer son adversaire sur la ligne de réparation. Rouen prend un dernier temps-mort à 18 secondes du terme. Mais l'étau Limougeaud ne desserre pas les dents, et le dernier shoot de Dorsey dans les derniers instants ne peut faire mieux qu'heurter l'arceau. La défense a tenu, Beaublanc peut enfin respirer. Et même crier, chanter, bref, remercier son équipe, remercier sa défense, et savourer cette victoire indécise jusqu'au bout.

On a pu assister ce soir à une fin de match intéressante. Il est courant dans ce genre de scénario d'assister à un jeu extrêmement haché où les deux équipes commettent un maximum de fautes pour espérer reprendre la possession le plus vite possible, quitte à envoyer l'adversaire aux lancers. Ce n'était pas la stratégie d'Olivier Cousin, qui a au contraire tout misé sur une défense hermétique, et chercher à faire défiler le compteur le plus vite possible sur la possession Rouennaise. Pari gagnant, mais difficile pour les nerfs ! Après une première mi-temps rassurante, Limoges a eu de gros soucis dans le troisième quart-temps, partiellement liés à l'arbitrage artistique évoqué précédemment, avant enfin de revenir, lentement, en misant tout sur cette défense vitale dans la méthode Cousin. Une nouvelle fois ce soir, cette défense cadenasse l'américain de Rouen à seulement 13 points (4/14 au shoot), après avoir annihilé les Ricains de Quimper, Dorsey n'échappe pas à la règle, et ses équipiers ne peuvent compenser l'apport d'un américain muselé. Thioune a en revanche été moins tenu (ayant probablement fait l'objet de moins d'efforts stratégiques pendant la préparation de ce match), et on aurait pu préférer qu'il soit suspendu comme lors du dernier match contre Poitiers (20pts et 9rbds pour lui ce soir).
Le collectif Limougeaud continue à se trouver ce soir après le match de Quimper. Oyono s'avère être une recrue judicieuse, qui commet peu d'erreur, et défend comme un joueur de Cousin (8pts, 7 fautes provoquées en 20 minutes). Lukovski semble encore loin de son meilleur niveau, mais offre une excellente gestion de la fin de rencontre. La paire gagnante est logiquement constituée de Tucker, meilleur marqueur Limougeaud avec 18 points (8/12 à 2pts) et rebondeur (9 prises), et de l'inénarrable Almonte, 8pts (100%), 7rbds et 3 passes, plus tout le reste.
Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir à Limoges pour être à la hauteur de ses ambitions, et être capable de gagner ce match ailleurs qu'à Beaublanc. Mais un scénario pareil vaut bien quelques concessions, et les supporters, encore sous le coup de l'explosion de joie des dernières secondes, ont de quoi être fiers de leur équipe.

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