Une saison à part ?

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En cette période creuse entre match 2 et match 3 qui promet d'être décisif quel que soit le côté où il penchera, prenons quelques instants pour regarder ces finales avec un oeil plus neutre pour constater que les héros sont français ! C'est la grande nouveauté de cette saison, amorcée par le titre de MVP unifié conquis par Adrien MOERMAN. Comment les JFL ont-ils pris le pouvoir dans notre ProA si américanisée et historiquement menée par des étrangers talentueux ? Dossier.

LES ANNEES 80-90

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Restons tout de même un poil chauvins sur Beaublanc.com et citons les Murphy, Collins et autres Brooks qui ont dominé de la tête et des épaules les eighties. Relayés par les Young, Zdovc ou encore Brown (avec une pensée quand même pour Rivers ou Rudd), les français pourtant avant l'avènement de l'export vers la NBA étaient présents dans l'hexagone mais ne parvenaient pas à briller plus intensément que les étoiles américaines souvent de très haut niveau déchus pour diverses raisons de la NBA mais grands joueurs devant l'éternel. Les rares exceptions comme Rigaudeau ou Bonato ne parvenant pas à s'exporter au pays du dollar.

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LES ANNEES 2000

Avec le déblocage de la NBA vis-à-vis des étrangers, plus en plus de talents français ont commencé à trouver refuge chez l'Oncle Sam collectant au passage des revenus totalement inédits et inaccessibles dans un championnat qui abrite Roanne, Chalon s/Saône ou Bourg en Bresse. Dans le même temps, la réponse franco-française à cette fuite des talents et à des arrêtés européens contraignant les ligues locales à ne pas discriminer les joueurs sur la base de leur nationalité fut d'augmenter la présence de joueurs étrangers dans le championnat de France. Cela eut deux effets :
- Le premier fit décliner la formation (les centres de formation de ProB disparaissant dans le mouvement) en raréfiant les minutes proposées aux français et en premier lieu aux jeunes.
- Le second fut de considérablement faire baisser le niveau des américains importés (tout en faisant exploser le tarif des français -qu'ils soient bons ou non-). Alors si quelques perles continuaient de venir poser leurs valises une saison ou deux dans l'hexagone, la plupart partaient sous des cieux plus rémunérateurs. Le championnat de France a donc vu débarquer toute une masse d'américains non-draftés et pas spécialement perclus de talent et se retrouva à être un peu la poubelle de l'Italie, de l'Espagne et aujourd'hui de la Turquie ou de la Russie.

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Les malheureux doués qui finissaient chez nous avaient forcément un vice caché qu'il soit psychologique, physique voire stupéfiant. Dans le même temps le "rêve" NBA s'est démocratisé chez les jeunes français (en particulier chez les pensionnaires de l'INSEP) qui ne pensaient plus qu'à se faire drafter et mettre les leurs à l'abri pour plusieurs générations sans forcément retenir les valeurs de travail et d'abnégation qu'une carrière pro nécessite.
Les exemples les plus flagrants sont les illustres NBAers du bout du banc, mieux payés que les stars de ProA mais qui n'auront qu'une pile de maillot et quelques photos de garbage-time à montrer à leur petits-enfants pour leur parler de leur "carrière". Demandez à Jérôme Moïso, Tariq Abdul-Wahad, Johan Pétro ou encore Yakhouba Diawara de vous raconter leurs "frissons" NBA... vous resterez sur votre faim !

LES ANNEES 2010

Plus près de nous (voire très près hein Mike ?!) les Pape Sy, Mickael Gélabale ou Nando de Colo ont touché le rêve du bout du doigt sans embrasser des carrières à la TP ou Diaw qui se sont imposés en NBA. Ces joueurs ont toutefois joué et recueillent pour la plupart aujourd'hui le fruit de leur travail en Europe dans de grands clubs et à des tarifs intéressants.

POURQUOI LA PROA 2015 EST ELLE SINGULIERE ?

Et bien parce que pour la toute première fois ses héros sont français. Les Moerman, Diot, Traoré et dans une moindre mesure Westermann, Gélabale voire Jaiteh ou encore Boungou-Colo font les gros titres et pas seulement parce qu'ils sont des "joueurs formés localement" (ahhhh la LNB et sa créativité !) mais bel et bien parce que ce sont eux qui animent le championnat. Après des années où la plupart des équipes reposaient sur un gros talent -la plupart du temps américain- qui s'exportait assez rapidement après ses performances (Salyers, Schilb, Spencer, Buycks...) vers des cieux plus rémunérateurs sans pour autant en tirer un gros temps de jeu. Voici venu le temps des français qui dominent les américains et qui sont les stars de leurs équipes respectives. Certes des Jeter, Howard ou encore Riley demeurent de forts joueurs, mais aujourd'hui les JFL de ProA n'ont plus à rougir de la comparaison. D'ailleurs Adrien Moerman MVP unique de la saison prouve qu'un français peut dominer l'élite française.
Alors, chez lecteurs, savourez bien ces finales ! Vous êtes peut être en train de voir une énorme exception dans la "logique" sportive de la ProA puisque les gros talents français qui rendent ces finales trépidantes risquent tous de suivre l'exemple d'un autre JFL talentueux parti de l'autre côté des Pyrénées, Edwin JACKSON, pourtant colonne vertébrale de l'ASVEL. Moerman est courtisé par le Maccabi, Diot est annoncé au Fener, Gélabale pourrait regagner l'Europe de l'Est et Traoré a déjà montré qu'il n'hésiterait pas à aller jouer au Liban si le contrat est sérieux.

UN TREMPLIN

Si la plupart des "bons" américains vus ces cinq-six dernières années en ProA (entendez pas transcendants mais très bons) se sont servi de notre championnat comme d'un tremplin pour (re)lancer leur carrière en Europe voire en NBA (l'exception Buycks), il semblerait que les français aient pour la première fois fait de même. Alors dans un horizon économique limité par la gestion rigoureuse de la ligue (là nous applaudissons) les taxes françaises et le manque d'exposition de la ProA face au foot ou au rugby (voire au hand), la ProA semble condamnée à servir de tremplin ou de championnat de développement à moins que des moyens financiers exceptionnels ne viennent durablement construire un mastodonte hexagonal permettant au moins à UN club de se payer des top-players européens (français & US). Faute d'une telle évolution, la saison 2014-2015 risque donc de ressembler à une belle parenthèse aux accents de Molière dans l'histoire de la ProA. PROFITONS.

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