Peur sur le stade

Ce soir, c'était le match à ne pas perdre. Deux équipes en dessous de leurs ambitions, devant affirmer un statut et rassurer les supporters. Dans ce match de la peur, Limoges, longtemps dominé, a fini par s'arracher pour obtenir la victoire. Le spectre de la défaite à domicile a un temps plané sur les travées avant d'être enfin balayé en fin de rencontre par la magie noire du sorcier Forté. Score final : 83-78.

Comme pour conjurer le mauvais sort, le revenant chargé de donner le coup d'envoi de cette grand-messe de ProB est reparti un maillot noir sous le bras, bien évidemment tatoué de son emblématique numéro 9. 5000 fidèles ont fait entendre leur ferveur en son honneur, et la cathédrale de Beaublanc a résonné comme aux plus grandes heures.

Enfin, les nouvelles idoles ont pu entrer sur le terrain. Lazare, Wampfler, Bucknor, Dubos et Latimore ont été chargés d'ouvrir la cérémonie. Animés de bonnes intentions, Dubos rate sa première tentative avant que Lazare ne lance réellement les hostilités. Wampfler cherche d'emblée à montrer qu'il faudra compter sur lui en défense, et Dubos confirme la première impression. 4-0, 2° min. N'Kembe recolle de loin et donne le ton du jeu Antibois, tandis que sa défense pousse Limoges a perdre des ballons. 6-6, 3° min. Bucknor, puis Ragauskas en contre attaque, alignent à leur tour au delà de la ligne des 6m 25, et redonnent un peu d'air au CSP, malgré le pressing agressif imposé par Morabito et ses acolytes. 12-8, 6° min. Comme on pouvait le redouter, le tableau des fautes est déjà déséquilibré. Wampfler est sorti après deux fautes, les autres ne sont pas en reste, tandis qu'Antibes n'a pas encore été sifflé. Heureusement, les mains azuréennes tremblent beaucoup aux lancers-francs, et laissent un peu d'air aux limougeauds. Les noirs nous offrent une belle séquence ou le ballon passe entre les mains de tous les cerclistes disposés régulièrement sur la ligne des 6m25, avant que Ragauskas ne conclue une nouvelle fois (20-11, 9° min). La réponse Antiboise, tout aussi lointaine, ne se fait pas attendre. Lazare manque de peu son shoot au buzzer, et la première période s'achève sur le score de 20 à 15, grâce surtout à la classe de Ragauskas et Bucknor.

L'écart repart d'entrée au second quart-temps, sur un panier accordé à Gouez. Ce sera le seul de son tout petit match : 6 min. Le mauvais-oeil tombe alors sur les pauvres limougeauds. Antibes se rapproche en contre attaque (22-19, 12° min). Storozynski et Bucknor se gênent et s'entraînent mutuellement à terre en défense. Fred Forté sent le vent tourner et veut conjurer le sort par un temps mort. Peine perdue. David Thévenon voit sa remise en jeu captée par les sudistes, le jeu trop rapide étouffe les cerclistes qui se voient inexorablement rattrapés (24-24, 13° min). Antibes ne s'arrête pas là et exploite toutes les failles offertes par les hommes en noir : pertes de balles, interceptions, mauvais placements en attaque, mauvais replacements défensifs... Antibes prend la tête, sans forcer au vu de la prestation désastreuse que livrent les cerclistes (24-28, 13° min). Storozynski, qu'il ne faudrait pas enterrer trop vite, tente de relancer l'ardeur des siens par un trois-points bien senti. Un coup dans l'eau. Même Bucknor est aux fraises en défense, tandis qu'Antibes continue sur sa lancée de loin. Heureusement qu'ils peinent aux lancers-francs ! (27-31, 14° min).
Quinzième minute du match. Heure constatée de la résurrection de celui qui n'était que le fantôme de lui même depuis le début de saison. Le numéro 13 redevient un porte bonheur, et Captain Thévenon marque à 2 puis 3 points (après une interception de Lazare). 32-31. Il n'est pourtant encore qu'au purgatoire, et ne peut empêcher son équipe de retomber dans ses travers. Après une faute de Bucknor, Storozynski rate le rebond sur le deuxième lancer, et la punition est immédiate. Cette erreur inadmissible se reproduit quelques instants plus tard, même motif, même punition, 32-37, puis 32-39 lorsque le chamane Forté prend son deuxième temps-mort (17° min). Et l'heure et grave ! Les passes s'évanouissent dans le vide, le rebond est complètement dominé... La défense de zone de Limoges bloque bien Antibes, quand une faute imaginaire est sifflé sur Dubos. Un dernier temps-mort Antibois va assommer les cerclistes (18° min). Les trois points azuréens s'enfilent comme des perles, en plus des contre-attaques... Les hommes en noir ont un genou à terre (34-47, 19° min). Ragauskas au buzzer limite la correction, pourtant une chose est claire : 37-49 à la mi-temps, ça va fumer dans les vestiaires !!. Comment en effet accepter un quart-temps concédé 17-34, avec au passage un honteux 18 à 2 ! Personne ne prend ses responsabilités côté cercliste, le collectif est aux abonnés absents, Bucknor est loin de son niveau après un 1° quart temps correct, on refuse des shoots, Storozynski reste assez transparent, Latimore est clairement diminué par son genou bandé, Thévenon prend plus de responsabilités qu'il ne le souhaiterait... Limoges ne peut tolérer d'être mené de 12 points à la mi temps, et se fait réellement peur. Il va falloir réagir, l'invincibilité à domicile se mérite à chaque match !

Au retour des vestiaires, l'écart cesse son hémorragie, mais refuse temporairement de maigrir. Dubos montre son bras roulé, mais le rebond est aux abonné absent et Bucknor commet sa troisième faute (39-52, 22° min). Thévenon fait mouche de loin et Dubos fait le métier en obtenant la faute (44-52, 24° min), mais la défense reste en difficulté. Thévenon encore réalise une belle interception avant d'être victime d'un authentique attentat à la 26° minute. Antibes dispose de trop de deuxième chances en attaque. Dubos marque avec la faute, puis commet une anti-sportive (49-62, 27° min).
Le tournant du match, presque inespéré, intervient enfin à la 28° minute. Latimore, d'un dunk rageur, réveille enfin l'appétit de l'ogre noir. Après une nouvelle pique lointaine de Ragauskas, Antibes prend un temps mort. Huit points d'écart, c'est jouable ! Ragauskas est omniprésent, s'arrache et récupère les possessions et score à nouveau, Thévenon intercepte, Latimore va chercher les fautes... (59-62, 30° min) La bête se réveille ! Ragauskas toujours, ramène les deux équipes à égalité, bien qu'une faute de Thévenon dans les dernières secondes permet à Antibes de garder une longueur d'avance à l'orée des dix dernières minutes. 62-63, un magnifique 13-0 en trois minutes a complètement renversé la tendance dans un match bien mal embarqué.

Au quatrième quart temps, Dubos sort rapidement après sa quatrième faute. Thévenon rate sa contre attaque, mais Storozynski peut conclure (64-65, 33° min). Les deux équipes commencent alors à jouer au chat et à la souris, chacune a son tour ayant une longueur d'avance. Storozynski rate écrans et réceptions de passes. La tension est à son comble sans actions marquantes... à la 37° minute, après une belle interception de Thévenon, le jeu s'arrête. Latimore sort en boitant. Auteur d'un bon match bien qu'on le sentais diminué, son genou droit bandé depuis le début ne lui permet plus de continuer. Dubos rompt alors le signe indien de l'inamovible point d'écart, et après un panier sur une passe lumineuse de Thévenon, passe enfin l'écart à deux points sur un lancer. Thévenon, impérial en cette fin de match, intercepte un nouveau ballon et part en contre attaque tout seul, puis va chercher la faute en roublard des surfaces (75-69, 38° min). Le chaudron Beaublanc est en ébullition, il chante et hue à se briser les cordes vocales. Son sorcier de présicoach prend un temps mort alors qu'il reste 1'27 à jouer. Les erreurs de Mulhouse sont encore dans les mémoires, il s'agit de ne pas les reproduire... Limoges ne pourra accepter un money-time offert aux visiteurs. Les fautes continuent à tomber, Antibes se rapproche aux lancers (75-73) puis envoie Captain Thévenon sur la ligne de réparation. Le premier est dedans, pas le deuxième, et sur un tir à trois points Antibes a l'occasion d'égaliser ! Il ne rentre pas heureusement et les cerclistes bétonnent enfin le rebond. À 20 secondes de la fin, Storozynski marque ses 2 lancers, 5 points d'avance, ça sent bon... lancers contre lancers, on arrive à 80-75 avant qu'un tir à 3 points étonnant de lucidité ne rapproche les sudistes du hold up. Mais Thévenon puis Bucknor convertissent les fautes offertes par les visiteurs et mettent un point final à la rencontre sur le score de 83 à 78. C'est pas passé loin !

Ce soir, Beaublanc a vibré, tremblé, crié, mais n'a pas craqué. Il n'est pas prés de digérer le pitoyable deuxième quart temps livré par les locaux, même si une fin de troisième quart temps façon « le retour des morts vivants » a permis d'éviter le pire. Ce soir Beaublanc a surtout retrouvé son capitaine (19 pts, 8 pds, 5 int, 28 d'éval) et pu admirer la classe d'un Ragauskas en grande forme (23 pts, 7/12 à 3pts). On s'inquiete toutefois de voir une raquette dominée au rebond et d'avoir du encaisser 10 contre attaques cinglantes. Les statistiques ne font pas tout, et ce soir ne rendent pas justice à Lazare, auteur d'un début de match convainquant malgré son 0 d'évaluation, pas plus qu'à la défense de Wampfler, et sont peut être flatteuses pour les erreurs de Storozynski. Elle trahissent aussi l'impression laissée par Antibes de facilité à longue distance, ainsi que celle de déséquilibre criant sur les fautes sifflées (surtout au début du match). Renaux n'est pas rentré sur le terrain, et Gouez n'y a fait qu'une apparition. Bucknor nous avait habitué à beaucoup mieux, Dubos le métronome a gardé la tête froide et fait un match sérieux et appliqué, et Latimore a fait une partie très propre malgré la douleur. Nous espérons sincèrement que sa blessure en fin de partie sera sans gravité et ne l'éloignera pas des terrains, car il est clairement indispensable au jeu limougeaud. Dans un championnat toujours très équilibré, Limoges pointe ce soir à une fière cinquième place, mais à un point de la deuxième place et en même temps à un point de la dernière place. Chaque victoire est donc bonne à prendre, même dans la douleur et la peur au ventre comme ce soir.

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