Le basket et la guerre
Depuis que le conflit a éclaté en Ukraine avec l'agression russe sur un territoire souverain, le monde sportif a réagi de façon notable. Dans ce concert de condamnations et de boycotts, le basket brille par sa neutralité pour certains voire sa lâcheté pour d'autres. Petit tour d'horizon de la situation sportive au milieu de ce gâchis humain.
"Le sport doit rester neutre"
Disons-le tout de suite, cette doctrine qui évite d'avoir à trop réfléchir ne tient pas une fois confrontée à la réalité. Comment ignorer les événements en cours en Ukraine ? Comment ne pas penser au BC Kiev qui a déjà croisé la route du CSP ? Comment ne pas penser à la situation des sportifs sur place qui sont aujourd'hui en treillis armes à la main ? Comment se pincer le nez et penser que ballons, raquettes et autres volants (de bad, de F1 ?) sont imperméables à la situation et doivent poursuivre leurs distrayantes joutes comme si de rien n'était ? Certains arrivent à s'imposer cet autisme pour continuer à compter des buts plutôt que des victimes mais force est de constater qu'heureusement ces naïfs sont à la marge. Qu'en est-il des intéressés ?
Les sportifs s'impliquent
Si de courageux individus se sont exprimés publiquement comme le tennisman russe Andrey Rublev (dont la prise de position est extrêmement risquée), ce sont des institutions qui ont plus de poids.
🙏 "No war please"
— Eurosport France (@Eurosport_FR) 25 février 2022
Le message d'Andrey Rublev 🇷🇺 après sa victoire en demi-finale à Dubaï !pic.twitter.com/lfJtx68wH1
A la suite des nombreux clubs qui se sont positionnés, l'UEFA a immédiatement délocalisé la finale de la Champions League de foot qui devait se tenir à St Petersbourg (en l'attribuant à Paris), dans le même temps, elle va casser son contrat de sponsoring avec GAZPROM. Attitude symbolique et coûteuse mais qui a le mérite d'être claire. Certains clubs l'imitent en prenant leurs distances avec des financiers russes. La propre fille de l'oligarque Abramovich (le propriétaire de Chelsea qui est sous la menace de graves sanctions financières de la part de Londres) s'est elle aussi exprimée publiquement via Instagram contre les intentions belligérantes de Poutine « Le plus gros et le plus efficace des mensonges de la propagande du Kremlin est que la majorité des Russes sont derrière Poutine. ». Encore plus "risqué" financièrement, le club de foot allemand de Schalke 04 s'est également séparé de son sponsor maillot GAZPROM, un choix impressionnant. La Formule1 a d'ores et déjà annulé le grand prix de Sotchi pourtant prévu en septembre. Les prochains championnats du Monde de Volley qui devaient se tenir en Russie sont également dans l'incertitude de nombreux joueurs ayant signifié leurs refus d'y participer dans ce pays. Les exemples semblent se multiplier...
Et le basket dans tout ça ?
Le basket me fait personnellement honte. C'est dit.
Si Tony Parker a montré la voie en refusant d'envoyer son équipe disputer une rencontre d'EuroLeague en Russie, les instances européennes habituées à la cacophonie et à la nullité décisionnelle ont une nouvelle fois brillé par leur manque de c... tripes.
Tony PARKER : "Nous n'irons pas en Russie la semaine prochaine. Je l'ai déjà annoncé à mes joueurs et mon staff. Cela va au delà du sport. On ne peut pas accepter la situation qui est totalement à l'opposé de nos valeurs. Il est hors de question d'envoyer notre équipe en Russie." pic.twitter.com/hVapdxEDEy
— LDLC ASVEL (@LDLCASVEL) 24 février 2022
Très tôt, la FIBA Europe s'est trouvée confrontée à la situation de l'Ukraine puisque Kiev dispute la FIBA Europe Cup (C4). Après avoir reporté un match, la FIBA a infligé un FORFAIT à l'équipe ukrainienne (20-0) !
FIBA Europe Cup annullata la gara tra Reggio Emilia e Kiev - https://t.co/Byo4tMqNyV di Maurizio Rossi pic.twitter.com/BAgzj7wF9K
— Basketinside.com #Kobe (@basketinside360) 15 février 2022
Côté "grande" Ligue, l'urgence a été d'attendre et si une réunion du board de l'EuroLeague a été organisée en urgence au lendemain de l'entrée en guerre russe, la montagne a accouché d'une souris : les matches impliquant des équipes russes ont été reportés (devant le refus de nombreux clubs de se rendre en Russie) et il serait envisagé de délocaliser les matches à domiciles des équipes russes en terrain neutre pour "ne pas pénaliser les joueurs".
Historiquement, le basket moderne a déjà connu un conflit avec la guerre en ex-Yougoslavie. Le Partizan avait ainsi remporté le championnat d'Europe des Clubs (cher à Limoges et à qui l'EuroLeague a succédé) en 1991-92, disputant ses matches "à domicile" en Espagne. Alors certes cette solution avait "épargné" le basket yougoslave (à l'époque) avant de le voir imploser et que les talents se répartissent sous les bannières nationales retrouvées dès l'été 92 avec les JO où la Croatie avait brillé face à LA Dream Team.
Une autre époque
Toutefois, préserver le sport local à cette époque avait un sens et donnait une forme de visibilité à ces joueurs qui pouvaient représenter fièrement la culture de leurs pays dans ce conflit fratricide. Aujourd'hui, le problème est tout autre : le basket ukrainien est quasi inexistant sur la scène continentale et il y a fort à parier que certains joueurs ukrainiens sont les armes à la main dans les rues de Kiev alors que les nombreux étrangers (majoritairement américains ont légitimement fui). Les internationaux ont eux fièrement disputé leur match de qualification face à l'Espagne en cette fenêtre internationale pendant que la Grande Bretagne a refusé de se déplacer en Biélorussie. Question que les Pays Bas ne se sont pas posés en allant s'incliner 80-69 à Perm le 24 février. Toutefois, ils refusent depuis de recevoir les russes pour le match retour... La FIBA pendant ce temps à pudiquement "repoussé" les dates des rencontres.
L'Ukraine joue face à l'Espagne lors de la fenêtre internationale pour les qualifs à la @FIBAWC
— The Upset Media (@TheUpset_media) 24 février 2022
Beaucoup de respect et d'applaudissements du public espagnol pour la sélection 🇺🇦 à son arrivée pic.twitter.com/NoSPkPsrOo
En revanche, l'agresseur russe est lui bien présent dans le monde de la grosse balle orange. Entre ses clubs nationaux et ses antennes sous perfusion de petro-gazo-dollars (coucou Monaco) comment le basket européen peut-il continuer à fermer les yeux et jouer contre des clubs qui appartiennent à des proches de Poutine ? Le CSKA est aussi historiquement le club de l'armée !!! D'ailleurs, le géorgien Toko Shengelia vient de déclarer qu'il refusait de continuer à jouer pour le CSKA Moscou.
Esto de @TokoShengelia23 sólo era el primer gesto. El ala-pívot 🇬🇪 rompe su vinculación con el CSKA y viajará a 🇪🇸 con su familia según ha asegurado a https://t.co/gKIV01qQu3 pic.twitter.com/Sj79KffsUS
— Chema de Lucas (@chemadelucas) 26 février 2022
Alors les boycotter ou même les exclure n'ira pas bien loin, le basket n'étant qu'un hobby pour ces oligarques qui se paieront un autre yacht au lieu de financer mais ce serait déjà un symbole. Les sanctions qui s'organisent au Royaume-Uni dans l'univers du football risquent de priver certains de leurs jouets pour lesquels ils se sont investis. Il s'agit plus d'agacer que d'affamer... La fin des matches en Russie sera aussi un signal pour le peuple russe gavé de désinformation. Poutine pourra-t-il tenir longtemps la ligne de victime quand son peuple constatera que plus personne ne vient vers eux ne serait-ce que pour jouer au ballon ?... C'est peut-être illusoire ou naïf mais en tout cas bien moins que de continuer à jouer en se pinçant le nez.
Anecdote
Pour conclure sur une note plus légère, parce qu'il faut sourire un peu au milieu de ce marasme, un grand coup de chapeau à l'agent de l'ancien joueur de Boulogne-Levallois Archie GOODWIN qui lui a conseillé de signer à... Kiev le mois dernier ! Faisant de lui le dernier joueur étranger recruté en Ukraine avant que le conflit n'éclate. Le joueur est depuis rentré aux Etats-Unis.
Prayers out to every one in Ukraine 🇺🇦. Total disregard for innocent lives.
— Archie Goodwin (@archie_goodwin) 24 février 2022
Toute l'équipe de Beaublanc.com, à son très modeste niveau, témoigne son soutien au peuple ukrainien dans cette terrible épreuve.
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Les tokens ne font pas tout !
Limoges 85 - 75 Pau-Lacq-Orthez : Analyse
# 34 - VALAS87
01/03 - 16h25
La FIBA a, enfin, pris position dans le conflit Ukraine-Russie en suspendant les équipes russes.