Oops he did it again!

Illustration

30 après, un meneur du CSP a réalisé une action décisive à quelques secondes du buzzer pour remporter le match sur le fil. A Athènes Fred Forte s'était joué de la star Toni Kukoc, à Beaublanc c'est Bryce Jones qui a offert une incroyable dose d'adrénaline à tout un peuple sur un tir arc-en-ciel par dessus la star Victor Wembanyama. Un shoot incroyable qui a tutoyé la désormais éternelle bonne étoile du CSP laissant la joie exploser et emmenant la fête jusqu'au bout de la nuit. Analyse.

Les héros célébrés

15 avril 1993. LA date qui a placé le Limoges CSP au firmament du basket européen. A jamais les premiers, cette team, ce commando, ces adeptes de la secte Maljkovic ont renversé des montagnes. Sabonis et le Real ont mis le genou à terre avant de voir le Benetton Trévise de Toni Kukoc s'incliner devant Dacoury et les siens. Ils ont presque tous fait le déplacement : les espoirs de l'époque Botton et Dupraz (coach champion 2014 avec le CSP), le Dac, Zdovc, Bilba, Butter et Redden. Manquaient à l'appel Michael Young l'artificier texan, cloué au sol à Houston pour raisons de santé, Jimmy Vérove, cloué au pilori du BCM avec ses peintres paloisiens, Marc M'Bahia, disparu des radars depuis des années et Boja empêtré dans les imbroglios du basket serbe à la veille de voir sa fille Marina disputer la finale de l'EuroLeague féminine. Le dernier, était un peu là, un maillot floqué du #4 et de la bonne étoile flottant au dessus du parquet... pour l'éternité.


Le CSP avait mis les petits plats dans les grands : séances de dédicace, jeux et activités sur le parvis de Beaublanc, écran géant dans le stade pour revoir le documentaire "Le coup parfait" et suivre le match, tshirts jaune ou grenat sur tous les sièges, maillot spécifique pour l'occasion, Tifo XXXL record déployé par les Ultra-Greens, feu d'artifice et soirée animée. Tout était prêt pour fêter dignement la trentaine du plus beau des titres.


Peur sur la ville

Avouons-le tout de go, personne n'abordait cette rencontre avec sérénité et la peur que la fête soit gâchée par une médiocre prestation des cerclistes cuvée 2023 était dans toutes les têtes. Humiliés face à Pau, balayés face à Paris et fessés au Mans... depuis l'exploit contre Monaco on ne reconnaissait plus ce CSP qui avait gagné sa place au TOP16 de BCL et dont la défense donnait des sueurs froides aux meilleurs techniciens.
Si les raisons de douter du CSP étaient nombreuses, c'était aussi oublier un peu vite que les Mets92 étaient coachés par l'alchimiste, cet homme seul capable de transformer l'or en argent (et de s'en voir félicité), ce monstre du coaching au charisme d'un tapis de sol de Kangoo en caoutchouc percé, le seul l'unique : Vinnie La Lose Collet ! Disposant de l'arme absolue : un Point-Center de 2m20 à la vélocité de meneur avec un shoot d'ailier et la dissuasion d'un big man, Vinnie réussit encore et toujours à nous surprendre. Malgré l'aide active des trois fan-boys de Wemby à qui il ne manquait que le maillot de l'idole pour souligner la dévotion à celui qu'ils ont protégé à outrance par leurs coups de sifflet intempestifs, c'est bien Limoges qui l'a emporté dans une fin de match dont seul Beaublanc a le secret.

LE MATCH


Du déjà-vu

La première mi-temps ne rassura personne. Après une première action voyant Nico Lang échouer seul (coupablement "oublié" par la défense des Mets) en tête de zone à 3pts, il semblait clair qu'on partait pour une longue soirée. Les limougeauds peu inspirés en attaque, évitant soigneusement la proximité de Wemby et ses longs segments, souffraient aussi en défense. Face à un adversaire une nouvelle fois rapidement en confiance, les fautes s'accumulaient rapidement. Les cocktails défensifs habituels sanctionnés de loin ou contrariés de près ne donnaient pas satisfaction, d'autant plus que la maréchaussée était on ne peut plus tatillonne dès lors que l'on effleurait la pépite (11 fautes provoquées 16LF donnés... ça facilite un peu la vie non ?! Ce sont surtout LES RECORDS DE LA SAISON pour Wemby). 14-21 à l'issue du QT1, 22-26 à la mi-temps. Les limougeauds couraient après le score comme depuis des semaines et on sait qu'à ce petit jeu ils échouent régulièrement malgré des retours improbables au prix d'efforts qui laissent des traces dans les organismes et dans les esprits.

Conquérants au retour des vestiaires

A la faveur d'un 26-15 infligé aux visiteurs sur le QT3, les cerclistes ont totalement renversé la table. Intraitables en défense, voire héroïques sur Wemby : Yeguete, Rodriguez, Kadji mais aussi Wojcie et Ugolin se sont relayés pour agresser le futur N°1 de la draft NBA. Repoussé au loin, pris à deux, contesté sans le ballon, les limougeauds ont fait passer une sale soirée à l'alien. Beaublanc a aussi joué son rôle sur celui qui a plutôt l'habitude d'être ovationné partout où il passe (Le Portel et Blois ayant même vendu des maillots Wembanyama lors de ses venues). Ainsi la licorne a vécu une formation accélérée à la pression. Sifflé, hué, il en a même raté 3LF de suite. Il s'est vite (et bien) repris mais c'est assez surprenant de la part de quelqu'un qui shoote habituellement à 83,5% dans l'exercice. Au terme de ces 10 minutes euphoriques, Limoges remet les compteurs à zéro : 62-62 et 10 minutes pour mettre tout le monde d'accord.

Bryce Jones le récidiviste

Le QT4 fut un échange où les deux équipe se rendirent coup pour coup. Si les Mets ont tenté de prendre le large, montant jusqu'à 5 points d'avance, le pilonnage d'Ugolin, Rodriguez, Lang et Jones a maintenu le CSP dans la course. A la faveur d'un ultime temps-mort, Massimo décide de ne pas laisser la balle de match aux métropolitains. Avec 2 points de retard à la faveur d'un lancer raté par Traoré, Limoges a son destin en main. La suite nous la connaissons désormais tous : Jones défie Wemby dans l'aile droite, le chrono s'égraine, cross, step-back... shoot alleluia qui frôle la voute de Beaublanc... la suite appartient à l'Histoire.


Oublié le Jones agaçant des dernières semaines qui mobilise la balle et sclérose l'attaque, on a retrouvé le Jones de Ludwisburg. Clutch à souhait, adroit et décisif. Alors comme en Allemagne, ce shoot n'apporte aucun titre mais il offre au meneur un statut à part dans notre histoire au même titre qu'un Satterfield ou un Lloyd Daniels. On pourrait citer Pooh Jeter qui en peu de matches a laissé une empreinte indélébile mais il a soulevé le trophée en fonte. Si cette équipe n'a probablement aucune chance d'accrocher une nouvelle bannière à Beaublanc, son exploit du soir a mis du baume au coeur à tout un peuple de passionnés et a surtout offert une victoire digne de lancer la fête des héros de 93.

Limoges reste en vie dans la course aux playoffs, même si c'est loin d'être gagné, mais le spectre de la zone de relégation s'éloigne quasi-définitivement surtout qu'en parallèle Pau a eu le bon goût d'en prendre presque 20 à Sportica. Encore une victoire et le maintien sera définitivement sécurisé.

L'ANALYSE


Wembanyama

Comment ne pas consacrer un paragraphe au phénomène ? Alors oui, on le savait, on l'avait déjà vu : le prodige est à la hauteur de ses promesses. Il a réalisé plusieurs actions de grande classe, exécutée avec une maîtrise impressionnante compte-tenu de son gabarit hors normes. Il est un cyborg comme on n'en a jamais vu. Les franchises NBA qui viennent de se manger des amendes colossales pour tanking abusif ne s'y trompent pas. Victor va changer la face du basket. Par contre, soyons honnêtes, si la LNB a bien fait de tordre les règles pour lui permettre sa tournée américaine en GLeague, la protection arbitrale dont il a fait l'objet ce soir confinait au ridicule. Le gamin pue le talent et il n'a pas besoin de ces chaperons siffleurs ! Pire : cela le dessert. Dès l'an prochain il va se frotter aux Durant, Embid et autres Antetokounmpo et là ce ne sera pas lui qui sera protégé ! Dernière chose : sa sortie. Wemby a applaudit le public en regagnant le tunnel... quand le petit(r)ou adresse des doigts à Beaublanc, Victor a la classe ! C'est peut-être aussi grâce à cet état d'esprit qu'il sera au-dessus.


On a aimé

Lucas UGOLIN UGOLIN, UGOLIN, UGOLIN ! Beaublanc ne s'y est pas trompé. Notre pépite à nous c'est lui ! 20 ans. 13pts à 100% ce soir. Il est un energizer, adroit, âpre en défense... on a parfois envie d'attraper Massimo par la barbe et de le secouer jusqu'à ce qu'il le fasse entrer ! Avec Wojcie et Lang on tient un véritable trident JFL sur lequel il faudra construire le prochain effectif.

Desi RODRIGUEZ Kévin ! Mets des paillettes dans notre vie et re-signe Dési stp !!! Le petit taureau est vraiment un joueur unique. Tant de puissance et d'efficacité dans un format aussi compact ça laisse encore et toujours songeur même des mois après sa découverte. Un espèce de Chris Massie dans le corps d'Adrien Moerman. Il ne nous éblouira jamais avec des dunks aériens mais sa défense et ses rebonds offensifs sont inestimables. Il a joué blessé ce soir. Un grand bonhomme.

Mathieu WOJCIE Il était partout, il a défendu comme un mort de faim. Il a pris les bons shoots. Il s'est même livré pour entraver Wemby. On ADORE Mathieu.

Nico LANG Avouons une pointe d'exaspération envers notre capitaine qui perd trop de temps avec les hommes en gris. La technique dont il écope (une nouvelle fois) aurait pu nous coûter très cher. A sa décharge, il souffre d'un manque de respect hallucinant compte-tenu de son statut : capitaine d'une équipe européenne, international, all star. Nico est clairement un des visages JFL de la Betclic Elite et il est sifflé comme s'il était encore au bout du banc à Chalon. Mais les deux ne sont-ils pas liés ? En attendant son shoot soyeux est toujours aussi précieux et sa banderille dans les ultimes minutes a fait aussi mal à Collet que celle de Pooh Jeter.


Tomas KYZLINK Là c'est gratuit et personnel, 0/3 aux tirs 2 d'éval mais j'adore ce joueur. Il est propre. Il monte la balle avec sérénité et défend dans le rythme. Utilisé comme il l'est en sélection tchèque il serait essentiel.

Wemby Comment ne pas aimer ce joueur. L'arbitrage exaspère mais il n'y est pour rien et il faut avouer qu'il dégage quelque chose de particulier. Rends nous fiers Victor, tu vas tout casser en NBA et qui sait... tu seras peut-être le VRAI alchimiste, capable de transformer Collet en Or ?! ^^

Armel TRAORE Sacrée prestation de l'intérieur des Mets. Puissant au rebond, solide dans l'impact et adroit. Comme plusieurs joueurs de l'effectif, il souffre de l'aura incroyable de Wembanyama, mais Boulogne ne serait pas dauphin sans le reste du roster et ce soir, après la licorne, c'est Traoré qui a fait la plus grosse impression.

Le Dac Prémonitoire, dans les vestiaires qui avec ses copains de 93 ont remis leurs maillots aux joueurs du soir. "On vous confie nos tenues de Superman"... Clairement, la tenue de Jones avait une cape dissimulée ;)

Beaublanc Cette salle et ce public sont EXCEPTIONNELS. Point barre. On a beau être chauvins, prétentieux et tout ce dont on peut nous taxer mais AUCUNE autre salle ne pue autant le basket que Beaublanc ! AUCUN autre public ne connait aussi bien le basket et ne sent quand son équipe a besoin de lui... Hier soir en scrollant sur Twitter, il y a eu quelques autres buzzer-beaters en Europe... Et bien en toute honnêteté, les explosions de joie sont 3 crans en dessous de ce qui s'est passé à Limoges hier soir ! 3 playmobils dans un lavabo en comparaison de la fusion et la communion qui ont soulevé les vénérables poutres de notre Palais des sports tant aimé.


Massimo BULLERI Une statue pour l'assistant italien sans qui le coach serait explusé à chaque rencontre. Il retient, s'interpose, bumpe, recadre le bouillant barbu. A mi-chemin entre éduc-spé et infirmier psychiatrique, Bullo est admirable de patience, le tout en se faisant parler comme à de la merde par un "technicien" hystérique. Grazie Massimo B.

On n'a pas aimé

L'arbitrage Ce n'est pas nouveau et comme Pierre et le loup on nous accuse de trop souvent leur taper dessus et de nous victimiser. Certes, mais un jour il faudra bien se demander pourquoi on les voit autant et pourquoi des équipes qui performent en Europe (avec un arbitrage globalement bien plus permissif et inspiré) peuvent se prendre les pieds dans le tapis en Betclic Elite. Avons-nous un règlement différent des autres ? Nos joueurs sont-ils plus fragiles en France pour que les moindres contacts soient sanctionnés ? Et pourquoi parfois, les sifflets disparaissent-ils totalement sans explication ? Il y avait faute sur le tir clutch de Jones... no call. Ca en devient RIDICULE.

Massimo CANCELLIERI Je ne sais pas pour vous mais j'ai ma dose. Non seulement il n'arrive pas à organiser l'attaque du CSP depuis le début de la saison, mais en plus ses défenses sont maintenant scoutées et nombre d'équipes ont ressorti les vieilles recettes face aux vieilles zones que l'italien a dépoussiérées. On l'a aimé bouillant, tirant le meilleur d'un effectif limité composé de chiens de la casse. On est exaspéré par sa commedia dell'arte devenue permanente. Syndrôme de la Tourette ou comportement à la limite de la correction avec son staff et ses joueurs ? La magie n'opère plus. Avec un effectif qui attend plus d'un stratège, le volcan fait pschit. Ce soir encore, sa technique aurait pû être lourde de conséquences. Comme l'a laissé entendre Céline Forte au micro de BEin Sport "RIEN n'est acté avec notre coach"... on peut donc penser à une fin de cycle sur le banc limougeaud et pour une fois, cela nous semble plutôt opportun.


Bryce JONES Et oui ! Notez que Satterfield n'est pas non plus prêt de voir son maillot retiré... Si le texan est généreux et plein de bons côtés, et s'il nous offre un souvenir impérissable avec ce shoot de légende, il n'en est pas moins un piètre distributeur qui bouffe le ballon de longues secondes au large sans mettre en place quoi que ce soit. Les consignes ne sont peut-être pas top du côté du coach mais cela fait de nombreux matches que Bryce facture très cher ses éclairs de génie individualistes. C'est sévère mais baskettement parlant, j'ai peur que ça ne soit pas contestable.

La suite...

Parenthèse dorée dans une fin de saison qui s'annonce laborieuse. On pourrait disserter sur les bases jetées pour construire mais ce n'est pas au mois d'avril qu'on trouve son match référence. Le profil de notre équipe est déjà bien connu : capable du meilleur comme du pire et une propension à se liquéfier face à des adversaire modestes pour mieux renverser des colosses. Ces joueurs qui n'ont pas compris l'importance d'un Clasico saisiront-ils l'intérêt des playoffs pour jouer l'Europe l'an prochain ? Rien n'est moins sûr. Et quand bien même... gratter le 8ème strapontin pour quoi ? Pour se faire taper par Moncao en mode playoffs ? De toutes façons, c'est ce que nous pouvons espérer de mieux, c'est dire...

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